Les hauts fonctionnaires : le trésor de Bercy – salaires en or et secrets d’État

En pleine crise des gilets jaunes, l’émission Complément d’enquête de France 2 levait le voile sur un sujet tabou : les rémunérations exorbitantes des hauts fonctionnaires, particulièrement au ministère des Finances à Bercy. À travers des témoignages d’anciens ministres, des documents confidentiels et des critiques acerbes, le reportage révélait un système opaque où les salaires peuvent atteindre des sommets inavouables, bien au-delà de celui du Président de la République. Six ans plus tard, en 2025, si certaines avancées en matière de transparence ont émergé, le secret reste tenace.

Nous exhumons ce reportage à l’heure où l’on demande aux Français des efforts colossaux par ceux même qui collectent l’impôt…

La polémique Jouanno : un salaire qui fait débat

L’émission s’ouvre sur Chantal Jouanno, alors présidente de la Commission nationale du débat public. En janvier 2019, Emmanuel Macron lui confie l’organisation du grand débat national pour apaiser les Gilets jaunes. Mais un article révèle son salaire : 176.000 € bruts par an, soit environ 14.600 € par mois. Ce montant, jugé « pas très Gilet jaune », déclenche une tempête médiatique. Jouanno, mise en cause pour son intégrité, renonce au pilotage du débat et demande même au Président de réduire son salaire.

Ce cas n’est pas isolé. D’autres présidents d’autorités indépendantes perçoivent encore plus : 19.900 € brut par mois pour l’Autorité des marchés financiers, 18.600 € pour l’Autorité de sûreté nucléaire, ou 15.725 € pour le CSA (vous savez, ceux qui nous censurent…). Ces chiffres, publics mais peu médiatisés, dépassent les 15.140 € brut du Président de la République. En pleine crise sociale, ils soulignent un décalage criant entre les élites et les citoyens.

Bercy, la forteresse des salaires secrets

Le cœur du reportage se penche sur Bercy, décrit comme une « forteresse » de 5.000 fonctionnaires où le secret est un art de vivre. Christian Eckert, ancien secrétaire d’État au Budget sous François Hollande, révèle avoir photocopié une liste ultra-sensible : les 150 plus hauts salaires du ministère des Finances en 2015. Parmi eux, des montants sidérants : jusqu’à 210.000 € nets par an (plus de 21.000 € par mois) pour le directeur régional des finances publiques d’Île-de-France, ou 188.409 € pour l’ancien secrétaire général de Bercy.

Ces salaires échappent aux grilles officielles de la fonction publique grâce à un système de primes obscur – indemnité différentielle, modulation – critiqué par la Cour des comptes. Dans une note de décembre 2017 (voir ici également), elle dénonce des dispositifs « sans fondement légal » et juge les rémunérations « difficiles à justifier ». Eckert, qui touchait « seulement » 7.050 € nets comme secrétaire d’État, s’interroge : pourquoi valider des salaires quatre fois supérieurs au sien ?

Le journaliste Vincent Jauvert, qui a publié cette liste dans L’Obs, dénonce l’énergie déployée pour cacher ces informations.

« Ce qui est scandaleux, c’est que ce ne soit pas public », affirme-t-il, soulignant l’ironie : ces fonctionnaires collectent l’impôt tout en masquant leurs propres revenus.

Bercy cultive le secret : les ministres peinent à obtenir des listes, comme Jean Arthuis sous Chirac, qui a attendu six mois pour une version non photocopiable. Même François Hollande, qui a baissé son propre salaire de 30 % en 2012, a lutté via sa ministre Marylise Lebranchu pour une transparence accrue. Elle identifie 650 « hauts salaires » sur 5 millions de fonctionnaires, une caste issue des grandes écoles comme l’ENA, protégée par des réseaux et des allers-retours public-privé (pantouflage).

Pantouflage et conflits d’intérêts

L’émission aborde le pantouflage : des hauts fonctionnaires détachés dans le privé, où ils gagnent jusqu’à cinq fois plus, avec garantie de retour dans l’administration. Exemples de la promotion Senghor d’Emmanuel Macron : Marguerite Bérard chez BNP Paribas, Sébastien Proto à la Société Générale. Ces transferts légaux posent des risques de conflits d’intérêts, comme l’illustre Michel Sapin, tenté par un cabinet d’avocats pour « contourner » sa propre loi anticorruption.

Jean-Pierre Jouyet, habitué des postes clés (président de l’AMF, secrétaire général de l’Élysée), défend les hauts fonctionnaires : leur retraite, calculée sur un salaire de base modeste (4 000-5 000 €), ne reflète pas leur dévouement. Attaquer ces « serviteurs de l’État » nourrit le populisme et décourage les vocations (SIC).

Comparaison internationale et appels à transparence

Au Royaume-Uni, depuis le scandale des notes de frais de 2010, tous les salaires des hauts fonctionnaires sont publics en ligne. En France, un sénateur proposait en 2019 une loi pour suivre cet exemple, mais Bercy résistait.

Évolutions en 2025 : vers plus de transparence ?

Six ans après l’émission, la transparence progresse sous l’impulsion de la directive européenne 2023/970 sur l’égalité salariale, transposée en France en 2025. La DGAFP précise le cadre pour la fonction publique, visant l’égalité à travail égal. Des changements sont attendus d’ici 2026, obligeant les employeurs à communiquer clairement sur les rémunérations.

Certains ministères publient désormais la somme des dix plus hautes rémunérations, comme la Justice en janvier 2025, pour renforcer la confiance publique. Les salaires des hauts fonctionnaires restent élevés : en moyenne 18.261 € brut pour les dix plus hauts dans la fonction publique d’État (données 2023), et certains atteignent 500.000 € par an. Cependant, une transparence totale comme au Royaume-Uni n’est pas encore acquise, et l’opacité persiste pour les détails individuels.

Un bastion qui résiste

L’émission de 2019 exposait les dysfonctionnements d’un système élitiste, où les salaires en or contrastent avec les contraintes budgétaires imposées aux citoyens. En 2025, les pressions européennes poussent à plus d’ouverture, mais Bercy garde ses secrets. Comme le soulignait Arthuis, « un peu de transparence aiderait à remettre l’église au centre du village ». Reste à savoir si la France franchira le pas pour restaurer la confiance dans ses grands commis de l’État. L’UE gesticule, mais la rémunération de Von der Leyen s’établit autour de 34.000 € / mois…

Reportage publié le 11 février 2019…

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