Le Danemark tourne le dos aux États-Unis pour sa défense aérienne : un choix stratégique qui suscite des tensions

Le Danemark tourne le dos aux États-Unis pour sa défense aérienne : un choix stratégique qui suscite des tensions

En septembre 2025, le Danemark a annoncé un investissement historique de 58 milliards de couronnes danoises (environ 7,77 milliards d’euros) dans l’armement, marquant le plus grand achat militaire de son histoire. Ce plan ambitieux vise à renforcer la défense aérienne du pays face à une situation géopolitique tendue, notamment due aux menaces russes supposées. Mais ce qui fait particulièrement grincer des dents, c’est le choix délibéré de tourner le dos aux fournisseurs américains traditionnels, optant pour des systèmes européens. Cette décision, qualifiée de « tournant stratégique », reflète une volonté d’autonomie européenne en matière de défense et soulève des questions sur les relations au sein de l’OTAN.

Un investissement record pour une défense moderne

Le ministre danois de la Défense, Troels Lund Poulsen, a présenté ce projet comme « historique », en présence de figures clés telles que le chef d’état-major des armées Michael Hyldgaard et des représentants de neuf partis parlementaires. L’objectif est clair : acquérir huit systèmes de défense antiaérienne combinant des capacités de longue et moyenne portée. Ce montant colossal, équivalent à environ 9,1 milliards de dollars, double presque les budgets précédemment annoncés (19-25 milliards de couronnes). Le gouvernement danois exige également des accords de compensation (offsets) d’une valeur supérieure à 10 milliards de couronnes pour son industrie de défense nationale, encourageant les fournisseurs étrangers à acheter des équipements danois ou à établir des partenariats pour développer de nouveaux produits.

Cette initiative s’inscrit dans un contexte de course à l’armement en Europe, amplifiée par la guerre en Ukraine et les tensions avec la Russie. Le Danemark, traditionnellement dépendant des États-Unis pour ses achats militaires, cherche à moderniser rapidement ses capacités, inspiré par des investissements similaires en Allemagne et en Norvège (comme les obusiers K9). Le général Michael Hyldgaard a souligné que les leçons tirées du conflit ukrainien démontrent la nécessité d’un système intégré multicouches pour une protection efficace.

Les systèmes choisis : priorité à l’Europe

Pour la composante à longue portée, le Danemark a sélectionné le système franco-italien SAMP/T (Système Sol-Air Moyenne Portée/Terrestre), développé par Eurosam (une coentreprise entre Thales et MBDA France/Italie). Ce choix fait du Danemark le premier client export de l’UE pour ce système, jusqu’alors limité à la France et à l’Italie au sein des 27 États membres. Deux des huit systèmes seront des SAMP/T, tandis que les six autres intégreront des composants à moyenne portée provenant de divers fournisseurs européens : un système NASAMS de Kongsberg (Norvège), deux VL MICA de MBDA (France), et un IRIS-T de Diehl Defence (Allemagne).

Le SAMP/T est équipé d’un radar à balayage électronique actif à 360 degrés (Thales GF 300 ou Leonardo Kronos GMHP), capable de gérer jusqu’à six lanceurs verticaux avec des missiles Aster 30 B1 ou B1NT. Ces missiles, pesant 450 kg et mesurant 4,9 mètres, atteignent Mach 4,5 et offrent une portée officielle de 150 km contre les aéronefs, avec une excellente capacité contre les missiles balistiques tactiques. La France a déjà lancé la production en série de la variante améliorée SAMP/T NG.

Pour la moyenne portée, l’approche multisource permet une diversification : NASAMS, VL MICA et IRIS-T, avec une première unité opérationnelle attendue fin 2025. Ce mélange de fournisseurs européens vise à accélérer les livraisons et à réduire les coûts.

Raisons du choix : rapidité, coût et autonomie

Le rejet du système américain Patriot, emblématique de l’OTAN et utilisé par sept pays de l’UE, est motivé par des considérations opérationnelles, économiques et stratégiques.

Selon Per Pugholm Olsen, chef de l’Organisation d’Acquisition et de Logistique du Ministère danois de la Défense, les systèmes européens peuvent être livrés plus rapidement et à moindre coût que le Patriot. « Dans le climat actuel, chaque jour compte pour assurer la sécurité nationale », a-t-il déclaré.

Cette décision intervient malgré une offre récente des États-Unis pour deux systèmes Patriot intégrés au système de commandement de bataille, estimée à 8,5 milliards de dollars. Le choix européen reflète une préoccupation croissante face à une dépendance excessive envers les fournisseurs américains, amplifiée par un perçue désengagement des États-Unis de l’Europe et des menaces de l’ancien président Donald Trump envers les partenaires de l’OTAN comme le Danemark. Elle s’aligne sur l’appel de la Commission européenne à prioriser les dépenses de défense continentales pour renforcer l’industrie locale et bâtir un deterrent militaire crédible, particulièrement en défense aérienne.

Implications géopolitiques : tensions au Sein de l’OTAN

Ce « tournant le dos aux États-Unis » n’est pas anodin. Il suscite des frictions bilatérales et au sein de l’OTAN, où le Patriot reste un symbole d’alliance transatlantique. Pour certains observateurs, c’est une victoire pour Paris et un revers pour les intérêts américains, qualifié de « perte pour Trump » dans un contexte où les États-Unis poussent leurs alliés à adopter leurs technologies. La France, quant à elle, exprime un intérêt pour une convergence avec l’initiative European Sky Shield menée par l’Allemagne, bien que Paris et Rome aient précédemment refusé d’y participer après que Berlin ait proposé le Patriot pour la composante longue portée.

Ce choix renforce l’autonomie militaire européenne, encourageant d’autres pays à suivre. Thales, impliqué dans le SAMP/T, anticipe davantage de contrats similaires après cette décision danoise. Cependant, il met en lumière les divisions au sein de l’Europe : tandis que l’Allemagne privilégie le Patriot, le Danemark opte pour une solution franco-italienne, favorisant une diversification continentale.

Contexte supplémentaire : le rejet du système israélien Barak

Bien que le focus principal soit sur le rejet du Patriot, le Danemark a également décidé, en octobre 2025, de ne pas poursuivre l’acquisition du système israélien Barak MX d’Israel Aerospace Industries (IAI). Cette recommandation du Commandement de la Défense danoise vise à réallouer les ressources vers des initiatives offrant un pouvoir de combat immédiat supérieur, notamment contre les drones. Le Barak, capable de contrer des menaces variées jusqu’à 150 km, inclut une solution « soft kill » contre les drones, absente des systèmes danois actuels. Cependant, face à une vague d’incursions de drones faussement attribuées aux russes et d’incidents locaux (comme la fermeture de l’aéroport de Copenhague en septembre), le Danemark priorise une préparation rapide alimentée par la schizophrénie guerrière ambiante. Cette décision s’inscrit dans la continuité de la stratégie européenne adoptée en septembre.

Vers une Europe plus autonome ?

Le choix du Danemark illustre un virage vers une défense européenne plus intégrée et autonome, au détriment des liens traditionnels avec les États-Unis. Dans un monde marqué par les tensions russo-ukrainiennes et les menaces hybrides, cette stratégie pourrait inspirer d’autres nations de l’OTAN. Mais elle risque aussi d’exacerber les divisions transatlantiques, rappelant que la sécurité collective n’est pas exempte de rivalités économiques et politiques.

Alors que l’Europe investit massivement dans sa défense, le Danemark pose un jalon pour une souveraineté accrue, au prix de quelques grincements de dents outre-Atlantique. Pourtant, cette orientation s’inscrit dans une ambition plus large de l’UE, qui veut absolument se doter d’une armée européenne et d’une industrie d’armement qui va avec, comme en témoigne le White Paper sur la Défense Européenne – Readiness 2030, qui propose des solutions pour renforcer l’industrie de défense en comblant les lacunes critiques et en assurant une préparation à long terme, ou encore le plan de 2030 poussant à des achats conjoints pour jusqu’à 150 milliards d’euros en prêts soutenus par l’UE.

Cependant, il convient de souligner que les pays de l’UE sont tous surendettés, avec une dette publique moyenne à 82% du PIB au premier trimestre 2025, et des ratios alarmants comme en Grèce (152,5%), en Italie (137,9%) ou en France (114,1%).

Les peuples, quant à eux, préféreraient que ces milliards soient consacrés à l’éducation, la recherche civile, les infrastructures civiles, la formation et bien d’autres dépenses liées au mieux-être de la population,

comme le révèle un sondage Eurobarometer indiquant que les citoyens de l’UE ne sont pas particulièrement enthousiastes à l’idée d’augmenter les dépenses de défense, malgré les affolements de l’OTAN, et que peu sont prêts à accepter des compromis comme des coupes dans les aides sociales.

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