L’affaire Lafarge en Syrie : financement du terrorisme et report du procès

L’affaire Lafarge en Syrie : financement du terrorisme et report du procès

L’affaire Lafarge, géant du ciment français racheté par le suisse Holcim en 2015, refait surface avec l’ouverture d’un procès historique au tribunal correctionnel de Paris.

Accusé d’avoir financé des groupes terroristes comme l’État islamique (Daech) en Syrie entre 2013 et 2014 pour maintenir son usine opérationnelle, Lafarge fait face à des poursuites pour « financement d’une entreprise terroriste » . Le procès, qui a débuté le 4 novembre 2025, a été suspendu après deux jours en raison d’irrégularités procédurales et reporté au 18 novembre 2025. Cette saga judiciaire, révélée par des enquêtes journalistiques et des plaintes d’ONG, interroge la responsabilité des multinationales en zones de conflit et les liens troubles avec les services de renseignement français.

Les origines de l’affaire : des paiements pour survivre en zone de guerre

Tout commence en 2010, lorsque Lafarge investit 680 millions de dollars dans une cimenterie à Jalabiya, près de Raqqa, en Syrie. Avec la survenance de la guerre civile en 2011, l’usine devient un enjeu stratégique dans une région contrôlée par des factions rebelles et jihadistes. Selon l’instruction judiciaire,

Lafarge aurait versé environ 5 millions d’euros à des intermédiaires pour assurer la sécurité de ses employés et la continuité des opérations :

3 millions en « dons » pour de bonnes relations avec les groupes armés (dont Daech, le Front Al-Nosra et Ahrar al-Cham), et 2 millions pour des achats de matières premières auprès de fournisseurs taxés par Daech. 

Initialement, des enquêtes journalistiques et des estimations préliminaires (comme celles publiées par Le Monde en 2016 ou citées dans l’instruction judiciaire) évaluaient le total des paiements suspects de Lafarge à environ 13 millions d’euros, incluant divers versements à des intermédiaires et groupes armés en Syrie. Cependant, au fil de l’enquête, les juges se sont concentrés sur des montants plus précisément documentés et prouvés, à savoir environ 5 millions d’euros (dont 3 millions en « dons » pour la sécurité et 2 millions pour des achats indirects via des fournisseurs taxés par Daech). 

Neuf prévenus sont jugés : Lafarge SA en tant que personne morale, huit cadres (dont des dirigeants parisiens comme Bruno Lafont et Christian Herrault), et des intermédiaires syriens. Les accusations portent sur la violation de l’embargo international imposé à la Syrie en 2011.

Des documents internes montrent que ces paiements étaient validés au plus haut niveau, malgré les risques.

Par ailleurs, Lafarge a déjà plaidé coupable aux États-Unis en 2022, écopant d’une amende record de 778 millions de dollars pour les mêmes faits.

Le rôle des services de renseignement français : une complicité tacite ?

Un aspect explosif de l’affaire réside dans les échanges entre Lafarge et les services français (DGSE et DGSI). Des mails et rapports déclassifiés, révélés par l’agence Anadolu (agence de presse d’État turque) en 2021, indiquent que l’entreprise informait régulièrement les renseignements de ses arrangements avec les jihadistes, fournissant en retour des informations sur Daech.

Les services n’auraient pas averti Lafarge de la qualification pénale de ces actes, ni ordonné l’arrêt des paiements.

Cela suggère une utilisation cynique de l’entreprise comme source d’intelligence, au détriment de l’éthique. Des critiques, comme celles relayées sur X par @aa_french, parlent d’une relation « cynique et opportuniste » où les services ont « grandement bénéficié » de ces infos sans intervenir.

Le report du procès : un coup de théâtre judiciaire

Prévu jusqu’au 16 décembre 2025, le procès a tourné court. Après deux jours d’audiences, la défense a soulevé des questions prioritaires de constitutionnalité (QPC), jugées « dilatoires » par le parquet. Mais une irrégularité dans l’ordonnance de renvoi a été confirmée, entraînant un report au 18 novembre 2025. L’ONG Sherpa, partie civile, a salué cette décision comme « équilibrée » , permettant une reprise sereine des débats. Onze anciens salariés syriens, représentés par Sherpa et l’ECCHR, espèrent des réparations pour les dangers encourus.

Parallèlement, une instruction distincte pour « complicité de crimes contre l’humanité » et « mise en danger délibérée de la vie d’autrui » se poursuit. La Cour de cassation a rejeté un recours de Lafarge en janvier 2024, confirmant la poursuite de ces chefs d’accusation. Cannelle Lavite de l’ECCHR note une « disjonction » dans l’instruction, où le financement du terrorisme est jugé en priorité, mais insiste sur la poursuite des enquêtes pour crimes contre l’humanité.

Réactions publiques et échos sur les réseaux

L’affaire enflamme les débats en ligne. Sur X, des posts du 5-6 novembre 2025 relaient le report : @ActuJuridiqueFR détaille les irrégularités procédurales, tandis que @Asso_Sherpa rappelle les enjeux des sanctions et du financement du terrorisme. @reseau_internat met en avant les 5 millions d’euros versés, et @lokitone1 lie l’affaire à un soutien français plus large à des groupes en Syrie et Gaza, évoquant une hypocrisie géopolitique. Ces réactions soulignent une défiance croissante envers les multinationales et les États en matière de conflits armés.

Implications et avenir de l’affaire

Si Lafarge est condamné, l’amende pourrait atteindre 100 millions d’euros, plus des dommages pour les victimes.

Au-delà, cette affaire pourrait établir un précédent pour la responsabilité des entreprises en zones de guerre, renforçant les mécanismes contre le financement du terrorisme. Les ONG comme Sherpa et l’ECCHR voient dans ce procès une « étape cruciale pour la vérité et la justice » , potentiellement exposant des complicités étatiques. Avec la guerre en Syrie toujours d’actualité, l’affaire Lafarge rappelle les coûts humains des intérêts économiques, et pourrait influencer les régulations internationales sur les embargos et les renseignements. Le report du 18 novembre 2025 sera scruté de près, marquant peut-être le début d’une longue bataille judiciaire.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

NOUS CONCERNANT
NOUS CONCERNANT
MultiPol 360
À l’heure où tout semble s’effondrer dans les sociétés humaines et où ceux qui prônaient un Nouvel Ordre Mondial unipolaire découvrent avec rage que la majorité des peuples du monde n’acceptent plus la dictature occidentale, notre équipe a décidé de vous présenter ce monde en mutation en analysant les faits principaux qui sont soit occultés soit manipulés par les médias aux ordres. Nous couvrons l’essentiel de l’actualité française et internationale sans que vous perdiez votre temps à chercher parmi les milliers d’informations qui nous sont proposées chaque jour. Aujourd’hui, ceux qui veulent s’informer pour approcher la vérité et résister à la désinformation du Système ont un nouvel outil à leur disposition : Il s’appelle MultiPol360. Nous sommes heureux de le mettre à votre disposition. Bienvenue dans le monde multipolaire de demain !

NOS CONSEILS DE LECTURE

Vous y trouverez des conseils de lecture qui vous aideront à mieux comprendre les enjeux de la géopolitique et des interactions qui gouvernent notre monde.

SITES AMIS