Coordination Rurale : un congrès sous haute tension qui pourrait rallumer la colère agricole

Coordination Rurale : un congrès sous haute tension qui pourrait rallumer la colère agricole

À Auch (Gers), berceau historique du syndicat, la Coordination Rurale (CR) tient les 18 et 19 novembre 2025 son 32e congrès national. Au-delà des discours et des hommages aux fondateurs, l’enjeu principal est l’élection du président pour les trois prochaines années. La sortante, Véronique Le Floc’h, affronte Bertrand Venteau, président de la Chambre d’agriculture de Haute-Vienne et figure emblématique du Sud-Ouest.

Un scrutin à huis clos, dont les résultats sont attendus ce mercredi matin, et qui pourrait bien décider si les tracteurs repartent bloquer les routes… ou si la CR s’installe durablement dans le fauteuil de la « cogestion » tant décriée.

Une percée historique… suivie d’une gueule de bois interne

Fondée en 1991 par une quarantaine d’agriculteurs révoltés contre les accords internationaux sacrifiant l’agriculture française, la CR s’est imposée comme le syndicat « contestataire », apolitique et indépendant. Avec ses 15.000 adhérents et ses bonnets jaunes, elle a capitalisé sur la colère de 2024 : trésorerie exsangue, normes européennes absurdes, concurrence déloyale, accord UE-Mercosur perçu comme une trahison.

Résultat : aux élections aux chambres d’agriculture de janvier 2025, la CR frôle les 30 % des voix (29,8 %) et arrive en tête dans 14 départements, principalement dans le Sud-Ouest et le Centre. Elle décroche la présidence effective de 11 chambres (contre 3 auparavant), conservant ses bastions (Vienne, Haute-Vienne, Lot-et-Garonne, Gers…) et en conquérant de nouveaux (Dordogne, Ardennes…).

Beaucoup y voyaient la fin de l’hégémonie FNSEA-État. La FNSEA d’Arnaud Rousseau, accusée de promouvoir une agriculture intensive et de rouler pour le gouvernement, recule mais sauve les meubles grâce aux alliances avec les Jeunes Agriculteurs et surtout grâce aux voix des collèges salariés et « banquiers-assureurs » de la MSA. Résultat : elle garde des présidences (Gironde, Charente-Maritime…) malgré une minorité chez les exploitants actifs.

Véronique Le Floc’h accusée de devenir une « FNSEA bis »

Élue de justesse en 2022, Véronique Le Floc’h, éleveuse laitière bio en Finistère, voulait incarner le renouveau. Mais dès l’automne 2024, les critiques fusent : trop de dialogue avec le ministère, trop peu d’actions coups de poing. En septembre 2025, elle déclare même que « les manifestations n’apportent pas de résultats concrets » et qu’il faut « faire des propositions ». Pour beaucoup d’adhérents, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase : la CR devient une « cogestionnaire » comme la FNSEA, apaisée et institutionnalisée.

Le reproche est violent, surtout dans le Sud-Ouest, berceau historique et bastion dur de la CR (Lot-et-Garonne de Serge Bousquet-Cassagne, Gers…). On lui reproche de brider les sections départementales, de ne pas faire ruisseler l’argent national vers les territoires et de transformer le syndicat en machine administrative plutôt qu’en force de contestation.

Bertrand Venteau, l’homme du terrain qui veut « refuser la FNSEA bis »

Face à elle, Bertrand Venteau, éleveur de limousines en Haute-Vienne, président de chambre depuis 2019 et réélu en 2025. Soutenu par les sections influentes du Sud-Ouest, il incarne la ligne dure : actions médiatiques, refus de tout compromis mou. « Nous ne voulons pas d’une FNSEA bis » , martèle-t-il. Ses partisans louent son « tempérament » et sa capacité à remettre les tracteurs sur la route dès que nécessaire, surtout avec l’accord Mercosur qui plane toujours comme une épée de Damoclès.

La grande trahison syndicale : quand les syndicats finissent par trahir leurs bases, et tous les Français

C’est là que le bât blesse, et pas seulement à la CR. L’histoire des syndicats agricoles français est jalonnée de ces « récupérations » : nés pour défendre les paysans contre l’État et l’Europe, ils finissent souvent par s’installer dans les fauteuils dorés de la cogestion. La FNSEA en est l’exemple caricatural : majoritaire depuis des décennies, elle négocie en coulisse avec les ministres, accepte des compromis (normes, accords de libre-échange, distorsions de concurrence) qui plombent les exploitations familiales au profit des gros céréaliers et de l’agro-industrie. Résultat ? Les agriculteurs votent avec leurs pieds… jusqu’à la prochaine explosion de colère.

La CR se voulait différente : indépendante, contestataire, sans compromis. Mais à peine arrivée au pouvoir dans des chambres, la voilà accusée du même péché : calmer le jeu, dialoguer, proposer au lieu de bloquer. Si Véronique Le Floc’h l’emporte, beaucoup craignent que la CR devienne un syndicat « apaisé »… c’est-à-dire domestiqué. Si Venteau gagne, les tracteurs pourraient vite reprendre du service.

Au fond, c’est le même schéma que chez les autres syndicats (CFDT, CGT, etc…) : une fois au sommet, on négocie sur le dos des bases.

Et qui paie ? Les agriculteurs, bien sûr, mais aussi tous les Français : importations low-cost qui tuent nos filières, normes qui renchérissent l’alimentation, accords commerciaux qui sacrifieront demain la souveraineté alimentaire.

Ce congrès d’Auch n’est pas qu’une élection interne. C’est un révélateur : la colère agricole de 2024 n’est pas éteinte. Elle couve. Et selon qui sortira vainqueur ce mercredi, elle risque soit de s’éteindre dans les salons ministériels… soit de revenir en force sur les routes. Les Français, qui ont soutenu les blocages l’an dernier, savent déjà ce qu’ils préfèrent.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

NOUS CONCERNANT
NOUS CONCERNANT
MultiPol 360
À l’heure où tout semble s’effondrer dans les sociétés humaines et où ceux qui prônaient un Nouvel Ordre Mondial unipolaire découvrent avec rage que la majorité des peuples du monde n’acceptent plus la dictature occidentale, notre équipe a décidé de vous présenter ce monde en mutation en analysant les faits principaux qui sont soit occultés soit manipulés par les médias aux ordres. Nous couvrons l’essentiel de l’actualité française et internationale sans que vous perdiez votre temps à chercher parmi les milliers d’informations qui nous sont proposées chaque jour. Aujourd’hui, ceux qui veulent s’informer pour approcher la vérité et résister à la désinformation du Système ont un nouvel outil à leur disposition : Il s’appelle MultiPol360. Nous sommes heureux de le mettre à votre disposition. Bienvenue dans le monde multipolaire de demain !

NOS CONSEILS DE LECTURE

Vous y trouverez des conseils de lecture qui vous aideront à mieux comprendre les enjeux de la géopolitique et des interactions qui gouvernent notre monde.

SITES AMIS