Comment financer la guerre en Ukraine avec des caisses vides ?
Paris, 3 mars 2025 – La France tangue sous une dette colossale de 3200 milliards d’euros, un déficit public qui flirte avec les 6 % du PIB, et pourtant, Emmanuel Macron ne semble pas prêt à lâcher l’Ukraine. Après le fiasco de la visite de Volodymyr Zelensky à Washington en février, où Donald Trump a menacé de couper les vivres à Kyiv, le président français martèle son soutien à l’effort de guerre ukrainien. Mais une question brûle les lèvres : avec quel argent ? Entre promesses d’aide militaire massive et appels à un réarmement européen, Macron joue gros, alors que les finances hexagonales sont dans le rouge écarlate.
Une facture ukrainienne qui s’alourdit
Depuis le début du conflit en 2022, la France a déjà déboursé plus de 5 milliards d’euros pour l’Ukraine, selon les chiffres officiels – 3 milliards en équipements militaires (chars Caesar, missiles) et 2,1 milliards via la Facilité européenne pour la paix. En février 2024, Macron a promis « jusqu’à 3 milliards supplémentaires » pour 2024, une annonce qui avait déjà fait grincer des dents alors que Bercy imposait un plan d’économies de 10 milliards sur le budget national. Aujourd’hui, avec Trump qui se désengage, le président français parle d’un rôle accru pour l’Europe, voire d’un envoi de troupes au sol une fois la paix négociée, pour « garantir la sécurité » face à la Russie.
Mais dans un pays où la dette a bondi de 45 % depuis son arrivée au pouvoir en 2017, selon l’Insee, et où les intérêts annuels à payer aux créanciers grimpent à près de 50 milliards d’euros, la marge de manœuvre ressemble à une peau de chagrin. « On ne peut pas tout faire : réarmer, soutenir l’Ukraine et éviter la faillite », tonne Dominique de Legge, sénateur LR et spécialiste des finances publiques. « La charge de la dette dépasse déjà ce qu’on met dans la défense. C’est un problème de souveraineté. »
Des idées dans l’air, mais pas de chèque en blanc
Alors, comment Macron compte-t-il financer ce grand dessein géopolitique ? Lors d’un échange avec des internautes le 20 février, il a lâché quelques pistes, sans entrer dans les détails. Première idée : « revisiter nos choix budgétaires ». Traduction probable : tailler dans les dépenses sociales ou augmenter les impôts, deux options explosives alors que le pouvoir d’achat des Français est déjà en berne. « On ne va pas sacrifier les retraites pour envoyer des soldats en Ukraine », prévient un élu Renaissance sous couvert d’anonymat, conscient du risque politique.
Deuxième piste, plus audacieuse : des « emprunts communs » européens, sur le modèle des 750 milliards levés pour la relance post-Covid. Macron viserait « 200 milliards d’euros dans un premier temps », selon des posts relayés sur X, pour doper les investissements militaires. Mais là encore, le pari est risqué. L’Allemagne, pilier financier de l’UE, traîne des pieds face à cette mutualisation de la dette, et des pays comme la Hongrie ou la Slovaquie, pro-Russes, pourraient bloquer l’initiative. « C’est une utopie sans consensus », lâche un diplomate européen à Bruxelles.
Enfin, Macron a évoqué des « produits d’épargne » pour mobiliser l’argent des Français, une sorte d’appel patriotique à la Nation. Une idée séduisante sur le papier, mais qui soulève des doutes : qui investirait volontairement dans une guerre incertaine alors que l’inflation rogne déjà les bas de laine ?
L’ombre de Trump et le réveil forcé de l’Europe
Le retrait américain, orchestré par un Trump décidé à négocier directement avec Poutine, met l’Europe – et Macron en première ligne – dos au mur. « On rentre dans une ère nouvelle », a prévenu le président français, sonnant « le tocsin » face à une Russie qui ne faiblit pas. Mais sans les dollars de l’Oncle Sam, l’addition ukrainienne repose de plus en plus sur les épaules des Européens, et la France, malgré son budget en lambeaux, veut montrer l’exemple.
Problème : l’effort militaire français, déjà porté à 50,5 milliards d’euros en 2025 (hors retraites), ne peut pas s’étendre à l’infini. La loi de programmation militaire 2024-2030 prévoit 413 milliards sur sept ans, mais elle n’inclut pas le financement d’une guerre prolongée ou d’une présence au sol en Ukraine. « On bricole avec des écritures comptables », critique Jean-René Cazeneuve, député Renaissance, pointant les astuces comme l’utilisation de prévisions d’inflation revues à la baisse pour dégager des marges.
Un pari à haut risque
Pour beaucoup, Macron joue sa crédibilité internationale et nationale sur ce dossier. S’il réussit à rallier l’Europe derrière lui, il pourrait s’imposer comme le leader d’un Vieux Continent réarmé. Mais si l’argent ne suit pas, il risque de passer pour un président aux promesses creuses, incapable de tenir ses engagements face à une opinion publique déjà sceptique. « Les Français ne comprennent pas pourquoi on donne des milliards à Kyiv pendant que l’hôpital s’effondre », confie un maire de province, écho d’un ras-le-bol qui monte.
Dans les six mois à venir, tout dépendra des rapports de force entre Bruxelles, Londres, Paris et Washington. Une chose est sûre : avec une dette à 112 % du PIB et une Russie qui ne plie pas, Macron marche sur une corde raide. Et les Français, eux, regardent la facture s’allonger.
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