En attendant un vrai budget, l’exécutif a officialisé samedi la reconduction temporaire des finances de 2025. Une procédure exceptionnelle sauve les meubles mais révèle les profondes paralysies du Parlement.
C’est désormais acté. Ce samedi, par sa publication au Journal officiel, le président Emmanuel Macron a promulgué la loi spéciale qui régira les finances publiques à compter du 1er janvier 2026. Ce texte, voté à l’unanimité par le Parlement mardi dernier, est loin d’être une victoire politique. Il constitue l’aveu criant d’un échec : l’impossibilité pour les députés et les sénateurs de s’accorder sur un projet de loi de finances dans les délais. Une situation évoquant les blocages outre-Atlantique, même si ce dispositif législatif permet précisément d’« éviter un blocage de l’Etat comme c’est parfois le cas aux Etats-Unis lors des shutdowns ».
Un budget figé, des ambitions gelées
Dans les faits, cette mesure technique « reconduit, jusqu’à l’adoption de ce budget, les impôts et les enveloppes allouées à l’Etat dans les conditions de 2025 ». L’État continuera donc de fonctionner et les services publics seront financés, mais toute perspective de nouvelle politique budgétaire est gelée. Le gouvernement ne peut ni créer de nouvel impôt ni engager de dépense inédite. Un cadre particulièrement inconfortable pour la majorité, alors que le chef de l’État a érigé la défense en priorité absolue. Les ambitions en la matière sont donc mises en suspens.
Ce scénario, hélas, commence à devenir familier. Après la chute du gouvernement Barnier en décembre 2024, la France avait déjà connu plusieurs mois de flou avant l’adoption des textes budgétaires en février 2025. L’histoire se répète, mais dans un contexte encore plus tendu.
Le dialogue engagé par le Premier ministre Sébastien Lecornu avec le Parti socialiste a certes permis l’adoption du budget de la Sécurité sociale, au prix de concessions sensibles sur les retraites. Mais ce fragile compromis n’a pas résisté au gouffre qui sépare l’Assemblée nationale du Sénat, cette dernière chambre étant « hostile à tout impôt supplémentaire ».
Le sursis de janvier
Face à cette impasse, le chef du gouvernement a affiché un optimisme de circonstance.
« Si les calculs politiques sont mis de côté, le Parlement prendra ses responsabilités, le gouvernement aussi », a-t-il déclaré, se disant « persuadé » de parvenir à un accord.
Un vœu pieux qui sonne comme un appel du pied, tandis que son camp le presse de recourir à l’arme nucléaire du 49.3. La loi spéciale n’est qu’un répit, un sursis accordé à la représentation nationale.
La véritable bataille est simplement reportée à janvier. Elle s’annonce brutale. Les parlementaires devront non seulement boucler un budget, mais aussi se confronter à l’épineuse question de la trajectoire des finances publiques. Les discussions écoulées n’ont « pas permis de dessiner une trajectoire de réduction du déficit », alors même que la France est confrontée à un endettement croissant. La loi spéciale évite le chaos immédiat, mais elle laisse intacte cette équation politique quasi insoluble. Le pays est en pilotage automatique, et les turbulences ne font que commencer.


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