Dockers de Fos-sur-Mer : boycott d’une livraison militaire vers Israël

Dockers de Fos-sur-Mer : boycott d’une livraison militaire vers Israël

Dans un acte de résistance remarqué, les dockers du port de Marseille-Fos, affiliés à la CGT, ont décidé de ne pas charger un conteneur contenant des pièces détachées destinées à des fusils-mitrailleurs, prévu pour être expédié vers le port d’Haïfa, en Israël. Cette décision, annoncée le 4 juin 2025, s’inscrit dans leur refus de participer à ce qu’ils qualifient de « génocide en cours orchestré par le gouvernement israélien » dans le conflit à Gaza. Ce geste, bien que salué par certains, contraste avec l’absence de mobilisation similaire face à d’autres exportations militaires françaises.

Une cargaison controversée

Le conteneur contenait 19 palettes de maillons, des pièces métalliques essentielles pour relier les munitions de mitrailleuses, fabriquées par l’entreprise marseillaise Eurolinks. Ces pièces étaient destinées à Israel Military Industries (IMI), une filiale d’Elbit Systems, principal fournisseur de l’armée israélienne. Selon des informations révélées par Disclose et le média irlandais The Ditch, cette cargaison de 14 tonnes devait être chargée à bord du navire Contship Era de la compagnie israélienne Zim, lors d’une escale le 5 juin à Fos-sur-Mer. Alertés par des réseaux militants, les dockers ont identifié et isolé le conteneur, refusant de le manipuler. Christophe Claret, secrétaire général des dockers du Golfe de Fos, a souligné que cette décision est irrévocable, bien que les autres conteneurs du navire aient été chargés normalement.

Un geste ancré dans des convictions humanistes, mais aux échos politiques

Dans leur communiqué, les dockers de Fos-sur-Mer, affiliés à la CGT, ont dénoncé l’utilisation du port pour acheminer des pièces destinées à l’armée israélienne, estimant qu’elles pourraient contribuer à la « tragédie humaine » dans le conflit à Gaza. Ils ont réaffirmé leur engagement en faveur de la paix et leur opposition à tout conflit armé, présentant leur refus comme un acte de conscience. Ce positionnement a été chaleureusement salué par des figures de la gauche française, notamment Manuel Bompard, député de La France insoumise (LFI), qui a proclamé sur les réseaux sociaux : « Gloire aux dockers de Marseille-Fos, la lutte s’organise contre le génocide à Gaza ! » Ce soutien reflète la ligne de LFI, qui, dans un contexte pré-électoral, adopte une posture résolument pro-palestinienne pour mobiliser son électorat sensible aux questions de justice internationale. De même, Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste (PS), a applaudi cet acte, déclarant que « l’humanisme n’est pas à vendre », une prise de position qui s’inscrit dans la stratégie du PS de renforcer son image progressiste auprès de ses sympathisants, tout en restant plus mesuré que LFI dans ses critiques d’Israël. Ces soutiens, bien que motivés par des convictions, s’inscrivent aussi dans une logique électorale, où la cause palestinienne est un marqueur politique fort pour capter l’attention des électeurs de gauche.

Une polémique récurrente

Ce n’est pas la première fois que des livraisons vers Israël suscitent la controverse. En mars 2024, Disclose et Marsactu avaient révélé des contrats entre Eurolinks et IMI Systems. Le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, avait alors assuré que ces pièces étaient destinées à la réexportation et non à un usage direct par l’armée israélienne, précisant qu’elles étaient assemblées en Israël avant de revenir en France. Cette explication n’a pas convaincu les dockers, qui estiment que ces composants alimentent le conflit. Selon Disclose, cette cargaison serait la troisième de ce type depuis janvier 2025, après des expéditions les 3 avril et 22 mai.

D’autres exportations sans réaction

Cependant, les ports français, comme Le Havre, Toulon ou Brest, facilitent régulièrement des exportations de matériel militaire vers d’autres pays, sans susciter de protestations similaires de la CGT. La France, troisième exportateur mondial d’armement avec 11 % du marché en 2021, a livré entre 2013 et 2022 des équipements à des nations comme l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis ou l’Égypte, impliqués dans des conflits controversés, notamment au Yémen. En 2022, les exportations d’armement français ont atteint 27 milliards d’euros, incluant des pièces détachées pour des systèmes comme les avions Rafale ou les frégates, souvent expédiées depuis des ports stratégiques. Ces livraisons, bien que critiquées par des ONG pour leur impact sur les droits humains, n’ont pas entraîné de blocages syndicaux comparables à celui de Fos-sur-Mer, suggérant une mobilisation sélective.

Un précédent historique

Ce refus s’inscrit dans une tradition de désobéissance civile portuaire. Dans les années 1960, les dockers marseillais avaient bloqué des cargaisons destinées à la guerre d’Algérie. Plus récemment, en septembre 2024, des arrimeurs de Fort-de-France, en Martinique, ont suspendu leurs activités pour d’autres causes. Ces actions montrent le rôle stratégique des travailleurs portuaires dans l’expression de convictions politiques.

Réactions et silence des autorités

Le ministère des Armées maintient que la France ne fournit pas d’armes directement à Israël, insistant sur la réexportation des pièces d’Eurolinks. L’entreprise et le port de Marseille-Fos n’ont pas commenté. Cette affaire met en lumière les dilemmes éthiques des travailleurs face aux exportations militaires, tout en soulevant des questions sur la cohérence des mobilisations syndicales face aux nombreuses livraisons d’armement depuis les ports français.

Ce geste, bien que symbolique, relance le débat sur la responsabilité des acteurs économiques dans les conflits internationaux et pourrait inspirer d’autres initiatives, tout en interrogeant la sélectivité des indignations.

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