Jean-Dominique Michel : « La seule façon de ne pas perdre son âme, c’est de monter d’un cran »
Dans un long entretien accordé à la chaîne Antithèse, l’anthropologue de la santé Jean-Dominique Michel, cinq ans après avoir été l’une des voix les plus écoutées – puis les plus honnies – de la crise Covid, annonce qu’il tire un trait sur le journalisme citoyen de combat pour revenir à ses premiers amours : neurosciences, salutogénèse et surtout spiritualité. Mais il ne s’agit pas d’une fuite pieuse :
Pour lui, la spiritualité est devenue la seule réponse viable à un système qui, selon ses propres mots, « ne nous veut pas du bien ».
Voir enfin le prédateur tel qu’il est
Le point de départ est brutal : la plupart des gens de bonne foi sont incapables d’imaginer qu’un être humain puisse avoir pour finalité de détruire les autres pour son propre profit. « C’est absent de leur répertoire », dit-il. Résultat : face à la perversion narcissique, au sociopathe ou au prédateur institutionnel, on rationalise, on excuse, on parle de « querelles d’ego ». Cette cécité collective explique pourquoi les sociétés se font manipuler « encore et encore ».
La seule chose qui ouvre enfin les yeux ? L’expérience douloureuse. Et la crise que nous traversons, aussi destructrice soit-elle, pourrait bien être « une expérience pédagogique à grande échelle ».
Pourquoi il arrête la « dissidence »
Après trois ans d’une tentative sincère de journalisme citoyen complexe (Covid, Trump, Gaza, Epstein…), Michel a été pris dans un feu croisé : d’un côté les « trumpolâtres » qui ne supportent aucune nuance, de l’autre les anti-Trump qui entrent en apoplexie à la moindre hypothèse alternative.
« J’ai fait ma part. Aujourd’hui je prends ma retraite de la dissidence. »
Il ne renie rien de ses analyses passées – il rêve même d’avoir tort sur la dangerosité des injections géniques – mais il constate que le terrain de la confrontation politique est devenu un piège : on y devient exactement comme ceux qu’on combat.
La spiritualité comme changement de registre
Face à des adversaires qui ne sont « pas bien intentionnés » et avec qui le débat sincère est impossible, rester sur le même plan mène à la défaite assurée.
« La plus grande victoire de ceux qui veulent nous opprimer, c’est de nous rendre pareils à eux. »
La seule issue : « monter d’un cran ». Passer du plan politique au plan spirituel. Non pas par naïveté angélique, mais parce que c’est le seul terrain où ils ne peuvent pas nous suivre.
Qu’est-ce que la spiritualité, concrètement ?
Pas de définition universelle – comme pour l’amour ou la justice – mais une expérience reconnaissable entre toutes : un moment où la vie ordinaire est dépassée, où l’on touche quelque chose de « plus vrai » que le quotidien, une dimension transcendante difficilement descriptible mais indéniablement vécue.
Les neurosciences confirment : toutes ces expériences (lumineuses, mystiques, esthétiques, synchronicités intenses, paranormales…) activent les mêmes réseaux tardifs du cerveau : ceux de la réflexivité, de l’empathie profonde et de l’altruisme authentique.
Le lien irréfutable entre spiritualité et santé
Plus de 20.000 études en 25 ans : les personnes ayant une pratique spirituelle régulière (religieuse ou non) ont 30 % de chances supplémentaires d’être en bonne santé et un risque de mortalité réduit d’un tiers – à tout âge.
Pourquoi ? Pacification face à la souffrance et à la mort, sentiment d’appartenance, baisse du stress chronique, activation des réseaux neuronaux de la bienveillance (voir ici).
Le nihilisme, religion dominante et mortifère de l’Occident
L’Occident souffre d’une religion qui ne dit pas son nom : le nihilisme.
Une vision antivie qui promeut l’euthanasie des vieux (« trop cher »), décourage la natalité (« à quoi bon des enfants avec le réchauffement ? »), laisse crever les SDF dans l’indifférence.
Et cette religion s’acharne particulièrement sur le christianisme (voir ici et ici), parce qu’il porte encore – même abîmé – l’idée folle que chaque être humain est sacré. Or un système qui veut tout marchandiser a besoin de détruire cette idée.
Les grands mensonges sur le passé chrétien
Michel démonte avec une tranquille érudition les clichés les plus tenaces :
- L’Inquisition ? Moins de victimes en six siècles à travers toute l’Europe que la Terreur révolutionnaire en un seul mois en France. Première procédure judiciaire équitable de l’histoire (98 % d’acquittements).
- La protection sociale sous l’Ancien Régime ? Souvent plus généreuse que nos systèmes actuels (corporations prenant totalement en charge veuves et orphelins).
- Le pouvoir royal ? Un roi de France avait moins de pouvoir arbitraire que le président de la République aujourd’hui.
« On a noirci systématiquement le passé pour justifier qu’on le jette à la poubelle. »
Comment cultiver la spiritualité quand on n’est pas croyant ?
Des pratiques simples, laïques et scientifiquement validées :
- gratitude active plusieurs fois par jour
- savourer vraiment ce qu’on vit
- écrire chaque soir trois choses qu’on a bien faites dans la journée (effet mesuré : estime de soi augmentée pendant trois mois)
- alterner concentration et défocalisation (marche en répétant une prière ou un mantra, pleine conscience, rosaire…)
Toutes ces micro-pratiques réorganisent le cerveau vers plus d’intuition, d’altruisme et de paix intérieure.
Espérance
« Le nombre de prédateurs qui veulent exploiter la masse jusqu’au bout est infime.
Le plus grand nombre aspire simplement à vivre une bonne vie.
L’éveil de conscience est à l’ordre du jour. Il se produira ou pas, mais il est déjà en marche.
Et je reste confiant : les plans d’asservissement finissent toujours par échouer.
La vie a plus d’un tour dans son sac. »
Un entretien qui ne console pas par des illusions, mais qui redonne des raisons solides d’espérer – à condition de changer de terrain et de refuser de descendre au niveau de ceux qui veulent notre perte.
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