La justice belge défie le parlement européen sur des soupçons de corruption

La justice belge défie le parlement européen sur des soupçons de corruption

Trois ans après le scandale du Qatargate qui avait ébranlé les institutions européennes, un conflit intense oppose les autorités judiciaires belges au Parlement européen. Cette enquête approfondie met en évidence comment les procureurs belges défient l’autorité du Parlement en menant des investigations sur la corruption impliquant des eurodéputés, souvent marquées par des erreurs et un apparent excès de pouvoir qui compromet la réputation de l’institution.

Ce bras de fer s’inscrit dans un contexte plus large de scandales récurrents, comme le « Huawei-Gate », qui révèlent des vulnérabilités persistantes face aux influences étrangères et privées.

Rappel du Qatargate : un scandale fondateur et ses développements récents

Le Qatargate, qui a éclaté en décembre 2022, reste le point de départ de ces tensions. Il impliquait des eurodéputés soupçonnés d’avoir reçu d’importantes sommes d’argent en échange de leur soutien aux intérêts du Qatar et du Maroc, notamment pour améliorer l’image du Qatar en matière de droits humains et faciliter un accord de voyage sans visa. Parmi les figures centrales : Eva Kaili, vice-présidente grecque du Parlement, arrêtée avec 150.000 euros en liquide à son domicile, et un total de 1,5 million d’euros saisis lors des perquisitions. D’autres suspects incluent Francesco Giorgi, son compagnon et assistant parlementaire, ainsi que Niccolo Figa-Talamanca, responsable d’une ONG italienne.

Un coup de théâtre est survenu en janvier 2023 lorsque Pier Antonio Panzeri, ancien eurodéputé italien socialiste et dirigeant de l’ONG Fight Impunity, a accepté de collaborer avec la justice belge en tant que « repenti ». En échange d’une peine allégée – cinq ans de prison dont quatre avec sursis, une amende de 80.000 euros et la confiscation d’un million d’euros d’avantages patrimoniaux – Panzeri s’est engagé à révéler le mode opératoire de l’organisation criminelle, les arrangements financiers avec des États tiers comme le Qatar et le Maroc, et l’identité de personnes corrompues ou impliquées non encore identifiées. Son avocat, Laurent Kennes, a déclaré : « Il a envie de déballer, il veut voir le bout du tunnel. » Cette collaboration pourrait élargir l’enquête, impliquant potentiellement d’autres eurodéputés comme Marc Tarabella, à qui Panzeri aurait versé entre 120.000 et 140.000 euros selon des déclarations rapportées, bien que contestées par l’intéressé. Le Maroc et le Qatar ont fermement démenti toute implication.

Roberta Metsola, présidente du Parlement, avait alors promis des réformes ambitieuses et une coopération totale avec les enquêteurs belges, perçus comme des alliés dans la lutte contre la corruption. Cependant, ces engagements initiaux contrastent avec l’évolution récente des relations, marquée par une défiance croissante.

Du Qatargate au Huawei-gate : une évolution tendue et des allégations précises

L’ambiance s’est inversée avec le « Huawei-Gate » en mars 2025, où les procureurs belges ont lancé une enquête sur des influences présumées de Huawei, divulguée publiquement et provoquant l’indignation au Parlement. Ce scandale, survenu deux ans après le Qatargate, met en accusation des lobbyistes de Huawei pour corruption active, participation à une organisation criminelle et blanchiment d’argent. Les pratiques remontent à 2021 et impliquent des cadeaux somptueux – billets pour des événements sportifs, frais de voyage – offerts à des eurodéputés et assistants pour influencer les décisions sur la 5G et la politique commerciale européenne.

Parmi les suspects : Valerio Ottati, ancien assistant parlementaire devenu directeur du bureau bruxellois de Huawei ; Lucia Simeone, assistante d’un député italien du PPE, arrêtée en Italie le 19 mars 2025 ; et Nuno W.M., consultant portugais arrêté en France le 13 mars. L’enquête cible une quinzaine de personnes, dont une dizaine d’élus ou anciens élus des groupes PPE, S&D et ECR. Quatre individus ont été mis en examen pour corruption et organisation criminelle, une cinquième pour blanchiment. Des perquisitions massives – une centaine de policiers mobilisés le 13 mars au Parlement, au siège de Huawei et au Portugal – ont révélé des liens avec des tentatives d’influence, et les dirigeants de Huawei auraient été informés, selon des mandats d’arrêt.

Huawei, non inculpé directement, a indiqué que deux employés avaient violé des lois locales et été licenciés, tout en coopérant avec les autorités. Le Parlement et la Commission européenne ont réagi en suspendant l’accès aux représentants de Huawei dès le 14 mars, marquant un tournant dans les relations avec l’entreprise chinoise.

Le point de rupture : excès de pouvoir et erreurs belges

L’affrontement culmine quand les procureurs demandent la levée d’immunité d’une eurodéputée pour une réunion Huawei qu’elle n’a jamais fréquentée, forçant un retrait embarrassant. Metsola dénonce cette « négligence » et s’engage à protéger l’institution contre des allégations non vérifiées. 

Depuis, le Parlement résiste à des demandes pour quatre autres législateurs. Six mois plus tard, aucun vote n’est programmé, qualifié de résistance « sans précédent » par des sources internes, illustrant comment la justice belge pousse les limites malgré ses faux pas. Ces retards s’ajoutent à ceux du Qatargate, où des levées d’immunité comme celle de Tarabella ont traîné, amplifiant les frustrations.

Échanges tendus en commission

En juillet, la commission JURI, présidée par Ilhan Kyuchyuk, convoque le procureur fédéral Ann Fransen pour une session « tendue » à huis clos. Kyuchyuk critique l’affaire comme « pas suffisamment étayée » dans une lettre, exigeant précisions sur infractions, base juridique et preuves. 

Fransen répond en septembre que le Parlement doit seulement vérifier l’absence de motifs politiques, sans accéder aux preuves pour éviter de compromettre l’enquête et la présomption d’innocence. Elle insiste sur la nécessité de lever l’immunité tôt pour recueillir des preuves, bloquées sinon par l’immunité. Le parquet belge décline tout commentaire supplémentaire en raison de la procédure en cours.

Implications pour l’UE : une vulnérabilité exposée et des réformes urgentes

Cette impasse révèle une faiblesse de l’UE face aux influences étrangères, où la justice belge voit du crime là où le Parlement voit de la politique, amplifiant les tensions par ses pouvoirs limités face à l’immunité. Les scandales comme le Qatargate et le Huawei-Gate soulignent des failles structurelles : un lobbying agressif par des acteurs comme la Chine ou le Qatar, des ONG utilisées comme vecteurs, et un risque d’espionnage, avec des appels à interdire les appareils Huawei dans les institutions. 

Les délais – habituellement cinq mois, parfois plus d’un an – paralysent les enquêtes.

Des eurodéputés admettent que les décisions d’immunité deviennent politiques, tandis que d’autres accusent les procureurs de nuire sans preuves solides.

La collaboration de Panzeri pourrait accélérer les révélations, mais elle met aussi en lumière les limites des outils anti-corruption actuels.

En juin, Metsola promet de revoir la coopération avec la police belge et rappelle les règles aux États membres via une lettre officielle. Des voix comme Daniel Freund (Verts) et Fabienne Keller (Renew) appellent à un organe d’éthique commun pour renforcer la transparence. 

Pour l’instant, la coopération est gelée, soulignant un défi de la justice belge à l’autorité parlementaire, avec des répercussions sur la transparence et la lutte anticorruption en Europe. Ces affaires érodent la confiance des citoyens et appellent à des réformes urgentes pour imposer une totale transparence concernant les activités de lobbying au sein de l’institution européenne.

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