Dans une vidéo publiée sur YouTube le 15 octobre 2025, intitulée « Gaza Peace Deal: Sustainable or Fragile ? Insights from Col. Jacques Baud » , le Professeur Glenn Diesen discute avec le colonel Jacques Baud, ancien officier des services de renseignement suisses et expert du Moyen-Orient, des implications d’un récent accord de paix visant à mettre fin à deux années de conflit à Gaza.
Cette conversation, riche en analyses historiques et stratégiques, met en lumière les doutes sur la durabilité de cet accord, négocié sous l’égide de l’administration Trump en janvier 2025.
Jacques Baud, auteur prolifique sur les conflits au Moyen-Orient, souligne les faiblesses structurelles de l’accord et les motivations sous-jacentes des acteurs impliqués. Cet article synthétise et approfondit ces échanges, en s’appuyant sur des faits vérifiés pour contextualiser les défis persistants dans la région.
Le contexte de l’accord : une première phase sans horizon clair
L’accord de paix, annoncé comme une « bonne nouvelle » pour mettre fin aux massacres à Gaza, est salué par les médias occidentaux comme une victoire diplomatique. Cependant, comme le note le colonel Baud,
il s’agit essentiellement d’une reprise d’un plan élaboré début 2024, mis de côté puis ressuscité par Donald Trump.
Ce plan repose sur une approche en trois phases : la première, un cessez-le-feu immédiat avec échange de prisonniers ; la seconde, une reconstruction et un retour à des services humanitaires ; et la troisième, une solution durable impliquant des institutions palestiniennes. Problème majeur : les phases deux et trois restent floues, non négociées en profondeur, et existent « seulement sur le papier » .
Selon des rapports récents, ce plan en 20 points, dévoilé par Trump le 29 septembre 2025, a été accepté par le Hamas sous pression, avec un ultimatum fixant une date limite au 5 octobre.
Jacques Baud souligne que les négociations ont impliqué les États arabes et Israël, mais pas directement les Palestiniens, qui ont reçu un document « à prendre ou à laisser » .
Une comparaison des versions montre que le plan est passé de 21 à 20 points après discussions avec Netanyahou, supprimant une clause sur la non-agression envers le Qatar – un détail intrigant qui, pour le colonel Baud, illustre les priorités israéliennes centrées sur la Palestine plutôt que sur des acteurs tiers.
Le Hamas, conscient de cette asymétrie, a accepté l’accord de manière stratégique. En refusant, il aurait justifié la poursuite des hostilités ; en acceptant avec réserves (nécessitant de nouvelles négociations sur des points comme le désarmement), il se positionne comme le parti responsable. Baud cite une déclaration du Hamas, relayée par Donald Trump, confirmant cet accord conditionnel. Cette manœuvre renforce la position politique du Hamas, surtout face à un Israël perçu comme réticent à honorer ses engagements.
La question centrale : un état palestinien réel ?
Au cœur des doutes sur la durabilité de l’accord se trouve l’absence d’engagement clair pour un État palestinien, pourtant inscrit comme point clé. Jacques Baud argue que, au-delà de Netanyahou, une large partie de la population israélienne rejette cette idée, favorisant un État juif exclusif. Cette vision s’ancre dans l’histoire : la résolution 181 de l’ONU (1947) recommandait une partition de la Palestine en deux États (juif et arabe) avec un régime international pour Jérusalem, mais sans attribuer de territoire spécifique aux Juifs ;
il s’agissait de propositions soumises à un référendum. Or, ce référendum n’a jamais eu lieu
Israël a déclaré son indépendance le 14 mai 1948 après des conquêtes militaires, menant à la guerre de 1948-1949.
Le colonel Baud rappelle que, en 1947, les Arabes (deux tiers de la population) prônaient un État unique avec deux nations égales, tandis que les Juifs visaient deux États séparés. L’expulsion d’Arabes et la saisie de terres ont créé un « fait accompli » contesté par les Palestiniens. Aujourd’hui, le Hamas, dans sa charte révisée de 2017, accepte un État palestinien sur les frontières du 4 juin 1967 (pré-guerre des Six Jours), marquant une modération par rapport à la charte de 1988 : focus sur la libération de la Palestine, sans appel à la destruction d’Israël, et acceptation d’un État sur les territoires occupés.
De plus, Jacques Baud invoque une résolution ONU (probablement une référence à des textes comme la 3236 de 1974 ou 37/43 de 1982, affirmant la légitimité de la lutte pour l’autodétermination, y compris armée, contre l’occupation). Cela légitime la résistance palestinienne face à l’occupation illégale, confirmée par la Cour internationale de Justice. Des pays comme la France conditionnent la reconnaissance de la Palestine au désarmement du Hamas, ce qui contredit ces principes onusiens.
Le 7 octobre 2023 : un catalyseur stratégique
Jacques Baud contextualise l’attaque du 7 octobre 2023 non comme un début isolé, mais comme une culmination de tensions : problèmes socio-économiques à Gaza (arrêt des paiements qataris aux fonctionnaires), tensions autour de la mosquée Al-Aqsa (menacée par des projets radicaux juifs), et escalade en Cisjordanie. Douze factions palestiniennes y ont participé, profitant d’un redéploiement israélien vers la Cisjordanie. L’objectif : élever la question palestinienne sur la scène internationale et libérer des prisonniers – partiellement atteint via des échanges.
L’opération, baptisée « Déluge d’Al-Aqsa » , visait à contrer les menaces sur les sites sacrés. Baud mentionne son livre sur le sujet, écrit avant octobre 2023, soulignant une crise préexistante. Le conflit a été qualifié de « génocide » par une commission ONU des droits de l’homme en 2025, marquant un tournant dans la perception internationale.
Défis internes pour Israël : une société radicalisée
L’accord expose les faiblesses d’Israël. Baud note que plus de 80 % de la population soutient la politique dure envers les Palestiniens, avec des manifestations focalisées sur les otages plutôt que sur la paix. Israël manque de constitution, se définissant comme « État juif » via des lois fondamentales récentes (2018), entraînant des discriminations internes.
Historiquement, Israël n’a pas défini ses frontières officielles:
lors de l’indépendance, Ben Gourion a évité de les fixer pour permettre l’expansion, influencé par le sionisme révisionniste (visant un « Grand Israël » incluant la Transjordanie). Cela rend tout accord précaire, Israël voyant la paix comme une pause tactique.
Le conflit a coûté cher : émigration massive, effondrement économique, et isolation internationale. L’image d’Israël s’est dégradée, avec une hausse des actes antisémites et des boycotts. Le colonel Baud prédit une pause pour reconstruction militaire, mais une reprise des hostilités.
Les relations avec l’Iran : un conflit irrationnel pour maintenir le soutien us
Enfin, Jacques Baud aborde les tensions avec l’Iran : sans différends territoriaux, ce conflit sert à Israël pour retenir le soutien américain, similaire à l’Ukraine vis-à-vis de la Russie. Historiquement alliés (contre les Sunnites), les relations se sont tendues post-2003 (invasion américaines de l’Irak). Le rapprochement Iran-Arabie saoudite (2023) change la donne.
Le colonel Jacques Baud voit dans les échanges de missiles de juin 2025 une démonstration de faiblesses israéliennes, justifiant une pause. Netanyahou a transmis via Vladimir Poutine un message de non-agression, mais les Iraniens restent sceptiques.
L’occident et la mort de la diplomatie
Jacques Baud critique l’Occident pour criminaliser les adversaires (Hamas comme « terroristes« , sans définition ONU), fermant la porte à la diplomatie. La paix se fait avec l’ennemi ; exclure le Hamas est absurde. Les Européens, y compris la Suisse, suivent les USA, diabolisant sans objectifs clairs, comme en Irak ou en Libye. Donald Trump a joué un rôle, mais le sommet de Charm el-Cheikh (sans Palestiniens) était une « mise en scène ».
En conclusion, cet accord semble une trêve fragile, masquant des enjeux profonds : absence d’État palestinien, radicalisation israélienne, et biais occidentaux. Comme le souligne le colonel Baud, sans inclusion des acteurs et reconnaissance historique, la paix reste illusoire. Des rapports récents confirment que, malgré le cessez-le-feu de janvier 2025, les tensions persistent, avec des appels à une solution à deux États. La région attend les phases suivantes, mais l’histoire suggère un cycle perpétuel.
 
                  
 
                               
                               
   
        
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