L’administration Trump fait l’objet de vives critiques pour son implication croissante dans le conflit ukrainien. Selon un récent article du Financial Times,
les États-Unis admettent fournir des renseignements et une assistance technique à l’Ukraine pour frapper des installations énergétiques russes en profondeur sur le territoire russe.
Cette révélation marque un tournant dans l’escalade, surpassant même les hésitations de l’administration Biden face à des actions potentiellement déclencheuses d’une guerre mondiale. Brian Berletic, ancien marine américain, analyste des affaires internationales et animateur de The New Atlas, offre une perspective tranchante sur cette situation. Dans une interview récente, il décortique les mécanismes sous-jacents : des actes de guerre déguisés, une continuité politique entre administrations démocrates et républicaines, et une stratégie d’escalade progressive connue sous le nom de « tactiques du salami » (négociation tranche après tranche, jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien).
Berletic, qui a servi dans les Marines avant de se tourner vers l’analyse géopolitique, met l’accent sur le manque de débat public en Occident malgré ces développements alarmants. Son travail, axé sur le multipolarisme et les dynamiques eurasiennes, révèle comment les intérêts corporatifs et les think tanks influencent la politique étrangère américaine. Cet article, inspiré de cette discussion approfondie, explore ces thèmes en détail, en s’appuyant sur des faits historiques, des rapports officiels et des analyses contemporaines. Nous examinerons si ces actions constituent véritablement des actes de guerre, les implications pour la Russie, et les perspectives d’un monde multipolaire comme alternative à l’hégémonie unipolaire américaine. Cet article vise à fournir une vue d’ensemble exhaustive, en évitant les simplifications médiatiques pour plonger dans les racines profondes du conflit.
Les actes de guerre américains : une aide directe aux frappes ukrainiennes
Le cœur de la controverse réside dans l’assistance américaine aux frappes ukrainiennes contre des cibles énergétiques russes. Comme le rapporte le Financial Times, l’administration Trump a fourni des données de renseignement pour cibler des raffineries de pétrole et d’autres infrastructures critiques, loin des lignes de front. Ces opérations, menées par des drones et des missiles ukrainiens, visent à affaiblir l’économie russe en perturbant sa production énergétique.
Dans cette optique, Trump agit comme un VRP obsédé par le ROI (retour sur investissement) : tout est calculé en fonction des gains immédiats.
Pour booster les ventes américaines de gaz de schiste, de pétrole et d’autres ressources énergétiques, il œuvre à éliminer toute concurrence, au mépris flagrant de la sécurité internationale.
Si ce calcul s’avère effectivement positif sur le plan commercial à court terme, il devient bien plus aléatoire – voire extrêmement dangereux – sur le terrain géopolitique, menaçant non seulement la sécurité nationale des États-Unis, mais aussi la stabilité du monde entier.
Berletic souligne que cela représente une implication directe des États-Unis dans des actes hostiles contre la Russie, qualifiables d’actes de guerre. « Si quelqu’un faisait cela aux États-Unis, les États-Unis accuseraient ouvertement toute nation qui soutiendrait ou encouragerait de telles attaques de commettre un acte de guerre », argue-t-il, en rappelant les doubles standards occidentaux.
Historiquement, l’implication américaine en Ukraine remonte à 2014, bien avant l’opération militaire spéciale russe de 2022. Dès le coup d’État de Maïdan, la CIA a pris le contrôle des services de renseignement ukrainiens, y compris le SBU et les agences militaires. Des rapports du Washington Post et du New York Times confirment que
les États-Unis ont reconstruit ces structures pour les aligner sur leurs intérêts, éliminant toute influence pro-russe.
Berletic insiste : « Qui supervise et facilite réellement ces attaques ? Cela a toujours été la Central Intelligence Agency. » Cette mainmise s’étend aux opérations militaires, avec des commandants américains basés en Allemagne dictant les stratégies ukrainiennes, des orientations générales aux choix de cibles spécifiques.
Cette escalade n’est pas nouvelle, mais elle s’intensifie sous Trump. Contrairement à Biden, qui hésitait à autoriser des frappes en profondeur pour éviter une confrontation nucléaire, Trump semble pousser les limites. Berletic voit cela comme une continuation logique : « Si Biden avait remporté un second mandat, il serait en train de le faire en ce moment. » L’approche est celle des « tactiques du salami » – des augmentations progressives si minimes qu’elles évitent une réaction massive de l’adversaire. Ainsi, les États-Unis intensifient constamment sans franchir une ligne rouge évidente, rendant difficile pour la Russie de qualifier publiquement ces actions d’actes de guerre.
La continuité entre Biden et Trump : une politique dictée par les intérêts corporatifs
Un thème récurrent dans l’analyse de Berletic est la continuité des politiques étrangères américaines, indépendamment des administrations. Trump, élu en 2024 sur des promesses de « geler le conflit » en Ukraine pour se concentrer sur la Chine, poursuit en réalité l’escalade. Son vice-président JD Vance avait déclaré en 2024 : « Nous avions besoin de nos armes pour combattre la Chine, pas l’Ukraine. » Pourtant, en février 2025, le secrétaire à la Défense Pete Hegseth appelait à l’envoi de troupes européennes pour « geler » le front, tout en augmentant la production d’armes pour l’Ukraine.
Berletic met en garde contre cette rhétorique :
« Il n’y avait aucun désir de paix en Ukraine, seulement celui de geler le conflit. »
Cela s’aligne sur un rapport (rapport complet disponible ici) de la RAND Corporation de 2019, intitulé Overextending and Unbalancing Russia, qui préconisait de provoquer un conflit prolongé entre la Russie et l’Ukraine pour épuiser les ressources russes, même si l’Ukraine en sortait dévastée. Le document soulignait que tant que la guerre reste statique, elle bénéficie aux États-Unis en affaiblissant la Russie sans gains territoriaux majeurs pour elle. Si la Russie avance, il faut « geler » les lignes pour préparer une nouvelle phase.
Cette stratégie transcende les partis. Trump, comme Biden, est influencé par les mêmes intérêts : l’industrie de l’armement, le pétrole, l’agroalimentaire et les think tanks financés par des corporations. Berletic cite des figures comme Scott Bessent, ancien bras droit de George Soros, nommé au Trésor, et des néoconservateurs bellicistes dans le cabinet Trump. « Ce sont des personnes différentes, mais elles représentent exactement les mêmes intérêts particuliers », explique-t-il. Les think tanks, tels que la RAND ou d’autres financés par l’armement, élaborent les politiques réelles, transformées en lois par des lobbyistes.
On peut aussi inclure les ONG dans ce camp car il y a les principales ONG de changement de régime créées par le directeur de la CIA et Reagan en 1983, à savoir, comme je l’ai dit, le National Endowment for Democracy (NED). Il a également financé le comité d’Helsinki norvégien qui entretient des liens avec le comité du prix Nobel de la paix (NHC). C’est donc un petit réseau de partisans du changement de régime. Le NED n’a pas été privé de financement ni désactivé, son site web est toujours en ligne et tout récemment, ils ont publié une déclaration félicitant cette dirigeante de l’opposition vénézuélienne qu’ils soutiennent depuis des années et des années, María Corina Machado.
Une étude de Yale sur les décisions politiques américaines de 1980 à 2000 confirme cela : le vote public a peu d’influence, contrairement aux intérêts corporatifs.
Brian Berletic ajoute que les médias, souvent liés à ces think tanks, étouffent les débats. Critiquer l’escalade contre la Russie vous fait taxer de « pro-russe », un risque que peu de journalistes prennent.
L’escalade des missiles tomahawk : une nouvelle étape dangereuse
Une escalade potentielle concerne les missiles de croisière Tomahawk. Des rapports récents indiquent que Trump envisage d’envoyer ces armes à longue portée à l’Ukraine pour presser la Russie à négocier. Zelensky assure qu’ils seraient utilisés uniquement contre des cibles militaires, mais Brian Berletic voit cela comme une continuation des tactiques du salami. « C’est une escalade majeure et la Russie a déclaré que c’en était une », dit-il.
Les Tomahawk, lancés depuis des navires, sous-marins ou systèmes terrestres comme le Typhon ou le Mark 41, permettraient des frappes en profondeur sur la Russie. Trump a quitté le traité INF en 2017 pour développer ces systèmes, facilitant leur déploiement. Brian Berletic prédit que les États-Unis fourniraient tout sauf appuyer sur le bouton : « Presque tout ce que fait l’Ukraine revient simplement aux États-Unis menant la guerre contre la Russie par l’intermédiaire de mandataires ukrainiens. »
Bien que les défenses aériennes russes puissent intercepter ces missiles, leur déploiement augmenterait les coûts pour la Russie, l’enlisant davantage.
Cela s’aligne sur l’objectif RAND : rendre la guerre coûteuse pour la Russie, sans viser une victoire ukrainienne.
« Les États-Unis ne se soucient pas de l’Ukraine », affirme Berletic. En 2025, avec une production américaine limitée (moins de 100 Tomahawk par an contre des milliers de missiles pour la Russie), cela reste une escalade symbolique mais dangereuse.
Les réactions russes et les perspectives multipolaristes
La Russie, selon Berletic, évite une confrontation directe tout en testant les limites. Vladimir Poutine offre des « portes de sortie » aux États-Unis et à l’Europe, reconnaissant que l’Ukraine s’épuise. Avec des frappes russes intensifiées sur les infrastructures ukrainiennes et l’effondrement potentiel de villes comme Pokrovsk, la Russie gagne du terrain. Sa production militaro-industrielle explose, surpassant l’Occident.
Cependant, des divisions émergent à Moscou : certains voient l’escalade américaine comme une opportunité pour affaiblir l’hégémonie américaine en Europe, d’autres exigent des représailles.
Brian Berletic note : « Vladimir Poutine n’est pas un dictateur ; il ne pourra pas contenir les forces politiques qui veulent une réponse beaucoup plus ferme. »
Si les lignes rouges sont franchies, comme des frappes sur le Kremlin, la Russie pourrait riposter.
À plus large échelle, Brian Berletic plaide pour un monde multipolaire comme alternative. La Russie et la Chine construisent des systèmes économiques et militaires indépendants, défiant l’unipolarisme américain. Des pays comme le Venezuela, ciblé par Trump pour son pétrole et ses liens avec Moscou et Pékin, illustrent cette guerre contre le multipolarisme. Le Prix Nobel de la Paix 2025, décerné à une opposante vénézuélienne soutenue par les États-Unis, est vu comme un outil de légitimation pour un changement de régime.
Vers un changement systémique ?
L’escalade en Ukraine sous Trump révèle les failles d’un système occidental dominé par des intérêts corporatifs. Brian Berletic exhorte à lire les documents de politique publique plutôt que les discours politiques :
« Ignorez ce que disent les politiciens. Leur travail est de nous mentir. »
Le multipolarisme offre une voie : créer des alternatives servant la majorité, y compris les Américains et Européens souffrant économiquement de ces guerres.
En fin de compte, sans débat public et avec une presse complaisante, le risque d’une guerre nucléaire plane. Comme le dit Brian Berletic, « Déclencher une guerre nucléaire, ce n’est pas être pro-russe. Nous allons tous mourir dans un holocauste nucléaire. » Il est temps de prendre du recul, comme le proverbe chinois : « Si l’on fait un pas en arrière, le monde paraît plus vaste. » Seule une compréhension globale peut mener à une paix durable.
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