Retournement géopolitique en Arménie: Pashinyan ordonne un rapprochement avec la Russie

Pashinyan pivote vers Moscou : un retour forcé ?

Dans un revirement inattendu, le Premier ministre arménien Nikol Pashinyan a récemment donné une directive claire à toutes les agences gouvernementales de son pays : rétablir les liens avec leurs homologues russes et participer activement à des événements conjoints. Cette décision, annoncée le 20 mars 2025 selon des posts relayés sur X et des informations rapportées par le journal arménien Hraparak, est justifiée par des « récents changements géopolitiques ». Elle marque un tournant significatif dans la politique étrangère de l’Arménie, qui semblait ces dernières années s’éloigner de son allié historique, la Russie, pour se rapprocher de l’Occident.

Un contexte de tensions et de réalignements

Depuis son arrivée au pouvoir en 2018 à la suite de la « Révolution de velours », Nikol Pashinyan a souvent été perçu comme un dirigeant cherchant à diversifier les partenariats de l’Arménie. Cette ambition s’est traduite par un renforcement des relations avec les États-Unis et l’Union européenne, notamment après la guerre de 2020 dans le Haut-Karabagh, où l’Arménie a subi une défaite cuisante face à l’Azerbaïdjan. La Russie, garante traditionnelle de la sécurité arménienne via l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) et un accord de défense bilatéral, avait alors été critiquée par Pashinyan pour son inaction face à l’offensive azerbaïdjanaise. Cette déception avait poussé Erevan à explorer d’autres options, notamment en signant un partenariat stratégique avec les États-Unis en janvier 2025 et en lançant le processus d’adhésion à l’UE.

Pourtant, ce rapprochement occidental n’a pas apporté les garanties escomptées. La perte définitive du Haut-Karabagh en 2023, suivie de tensions persistantes avec l’Azerbaïdjan, a mis en lumière la vulnérabilité de l’Arménie. Dans ce contexte, les « récents changements géopolitiques » évoqués par Pashinyan pourraient inclure l’évolution de la guerre en Ukraine, qui mobilise l’attention et les ressources russes, ainsi que l’incapacité apparente de l’Occident à offrir une alternative crédible à la protection russe face aux menaces régionales.

Un pragmatisme face à la realpolitik

En ordonnant un retour vers Moscou, Pashinyan semble faire preuve de pragmatisme. La Russie reste un acteur incontournable dans le Caucase du Sud, avec une base militaire en Arménie et une influence économique significative via l’Union économique eurasiatique (UEEA), dont l’Arménie est membre. Cette décision pourrait également répondre à des pressions internes : une partie de la population et de l’élite politique arménienne considère que s’éloigner trop radicalement de Moscou compromet la sécurité nationale, surtout face à un Azerbaïdjan soutenu par la Turquie.

Ce virage ne signifie pas pour autant un abandon total de la diversification entreprise ces dernières années. Pashinyan pourrait chercher à adopter une approche équilibrée, maintenant des liens avec l’Occident tout en renouant avec la Russie pour stabiliser sa position régionale. Cependant, cette stratégie de balancier n’est pas sans risques : elle pourrait irriter les partenaires occidentaux, qui ont investi dans le soutien à la « démocratie arménienne », tout en ne garantissant pas une réconciliation complète avec une Russie méfiante après les critiques passées de Pashinyan.

Réactions et incertitudes

L’annonce a suscité des réactions contrastées. Sur X, certains observateurs y voient un retour à la raison, soulignant que l’Arménie n’a pas d’alternative viable à la Russie dans un environnement hostile. D’autres, au contraire, dénoncent une volte-face opportuniste, accusant Pashinyan de sacrifier les aspirations pro-européennes du pays sur l’autel de la realpolitik. À Moscou, aucune réponse officielle n’a encore été formulée, mais ce geste pourrait être interprété comme une opportunité pour la Russie de réaffirmer son influence dans le Caucase, à un moment où sa crédibilité régionale est mise à l’épreuve.

Il reste à déterminer comment cette directive sera appliquée dans les faits. L’idée de participer à des « événements communs » suggère des initiatives bilatérales avec la Russie ou multilatérales, peut-être dans le cadre de l’Union économique eurasiatique (UEEA) ou de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) – bien que l’Arménie ait récemment gelé sa participation à cette dernière. Les agences gouvernementales arméniennes devront composer avec une méfiance persistante entre Erevan et Moscou, tout en tenant compte des attentes d’une population partagée sur l’orientation géopolitique à adopter pour l’avenir du pays.

Une nouvelle ère pour l’Arménie ?

À l’heure où la guerre en Ukraine redessine les équilibres mondiaux et où le Caucase reste une poudrière, la décision de Pashinyan reflète les dilemmes d’un petit État coincé entre grandes puissances. En optant pour un retour vers la Russie, l’Arménie cherche à sécuriser sa position dans un monde incertain. Mais ce choix pourrait aussi raviver les tensions internes et compliquer ses relations avec l’Occident, laissant planer le doute sur la capacité de Pashinyan à transformer cet ajustement tactique en une stratégie durable pour l’avenir de son pays. Une chose est sûre : dans le grand jeu géopolitique, l’Arménie n’a pas fini de danser entre plusieurs partenaires.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

NOUS CONCERNANT
NOUS CONCERNANT
MultiPol 360
À l’heure où tout semble s’effondrer dans les sociétés humaines et où ceux qui prônaient un Nouvel Ordre Mondial unipolaire découvrent avec rage que la majorité des peuples du monde n’acceptent plus la dictature occidentale, notre équipe a décidé de vous présenter ce monde en mutation en analysant les faits principaux qui sont soit occultés soit manipulés par les médias aux ordres. Nous couvrons l’essentiel de l’actualité française et internationale sans que vous perdiez votre temps à chercher parmi les milliers d’informations qui nous sont proposées chaque jour. Aujourd’hui, ceux qui veulent s’informer pour approcher la vérité et résister à la désinformation du Système ont un nouvel outil à leur disposition : Il s’appelle MultiPol360. Nous sommes heureux de le mettre à votre disposition. Bienvenue dans le monde multipolaire de demain !

NOS CONSEILS DE LECTURE

Vous y trouverez des conseils de lecture qui vous aideront à mieux comprendre les enjeux de la géopolitique et des interactions qui gouvernent notre monde.