La route de la soie : un pont millénaire entre l’orient et l’occident

La route de la soie : un pont millénaire entre l’orient et l’occident

La Route de la Soie, bien plus qu’un simple réseau de voies commerciales, incarne l’un des plus grands chapitres de l’histoire des échanges mondiaux. Reliant l’Asie à l’Europe et à l’Afrique pendant des millénaires, elle a façonné les interactions économiques, culturelles et religieuses à travers les continents. Aujourd’hui, sous l’égide de la Chine, les « Nouvelles Routes de la Soie » ou Belt and Road Initiative (BRI), lancées en 2013, ambitionnent de redessiner la géopolitique mondiale. Cet article explore l’héritage historique de la Route de la Soie, les ambitions contemporaines de la BRI, et les enjeux qu’elle soulève.

Un héritage historique

Le terme « Route de la Soie », popularisé au XIXe siècle par le géographe allemand Ferdinand von Richthofen, désigne un réseau complexe de routes terrestres et maritimes reliant la Chine à la Méditerranée. Dès le IIe siècle avant notre ère, sous la dynastie Han, l’envoyé Zhang Qian ouvrit la voie à des échanges commerciaux en explorant l’Asie centrale. La soie chinoise, convoitée à Rome, en Égypte et en Grèce, donna son nom à ces routes, mais bien d’autres marchandises – épices, thé, porcelaine, papier, ou encore chevaux, vin et or – y circulaient. Les routes facilitaient aussi la diffusion d’idées, de religions (bouddhisme, christianisme, islam) et de technologies, comme le papier et la poudre à canon.

La route de la soie : un pont millénaire entre l’orient et l’occident
Caravane sur la route de la soie

Ce réseau, qui s’étendait sur plus de 6.400 km, traversait des régions aussi diverses que l’Asie centrale, le Moyen-Orient et l’Europe de l’Est. Cependant, à partir du XVe siècle, l’instabilité politique, les guerres turco-byzantines et l’essor des routes maritimes européennes entraînèrent son déclin. La Route de la Soie devint alors un symbole d’un passé glorieux, jusqu’à sa renaissance contemporaine sous la forme de la BRI.

Les nouvelles routes de la soie : une ambition chinoise

En septembre 2013, le président chinois Xi Jinping annonça la BRI lors d’un discours à Astana, au Kazakhstan. Surnommé le « projet du siècle », ce programme vise à relier la Chine à l’Europe, à l’Afrique et à l’Asie par un vaste réseau d’infrastructures : routes, voies ferrées, ports, pipelines, et réseaux numériques. La BRI se compose de deux volets principaux : la « Ceinture économique de la Route de la Soie » (terrestre) et la « Route de la Soie maritime du XXIe siècle ». En 2017, le projet a été inscrit dans la Constitution du Parti communiste chinois, soulignant son importance stratégique.

La BRI englobe aujourd’hui plus de 150 pays, représentant environ 40 % du PIB mondial et 4,4 milliards de personnes. Des projets emblématiques incluent le chemin de fer Vientiane-Kunming au Laos, le port de Gwadar au Pakistan, et des corridors logistiques en Asie centrale. La Chine a investi environ 1.000 milliards de dollars, soutenue par des institutions comme la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures (BAII).

Objectifs et impacts

Économiques

La BRI vise à stimuler le commerce chinois en réduisant les coûts et les délais de transport. Par exemple, un trajet Shanghai-Rotterdam, qui prend un mois par voie maritime, peut être réduit à deux semaines par rail. Elle permet aussi d’écouler les surcapacités industrielles chinoises et de sécuriser l’approvisionnement en matières premières, notamment en hydrocarbures. En Asie centrale, les investissements chinois dans les infrastructures (ports, routes, chemins de fer) ont renforcé les échanges commerciaux, bien que les bénéfices locaux restent inégaux.

Géopolitiques

La BRI est un outil de projection de la puissance chinoise. En Asie centrale, elle contrebalance l’influence russe et américaine, tout en sécurisant les frontières chinoises, notamment au Xinjiang. Dans l’Arctique, la « Route de la Soie polaire » vise à exploiter les nouvelles voies maritimes ouvertes par le réchauffement climatique, renforçant l’accès aux ressources naturelles. Cependant, cette expansion suscite des inquiétudes, notamment aux États-Unis, qui y voient une tentative d’hégémonie chinoise (voir ici).

Culturels et sociaux

La BRI promeut le « soft power » chinois à travers des échanges culturels et éducatifs. Cependant, des tensions émergent, comme au Pakistan, où des groupes locaux, tels que l’Armée de libération du Balouchistan, dénoncent une exploitation des ressources régionales.

Critiques et Défis

Malgré son ambition, la BRI fait face à des obstacles majeurs :

  • Endettement : De nombreux pays, comme le Laos ou le Sri Lanka, se sont lourdement endettés pour financer des projets BRI, alimentant les accusations de « piège de la dette ». Le Laos, par exemple, a vu sa dette extérieure atteindre 66 % de son PIB en 2021.
  • Enjeux environnementaux : Bien que Xi Jinping ait promis en 2021 de cesser le financement de centrales à charbon à l’étranger, des projets polluants persistent, comme une centrale à Gwadar en 2023. Les lignes directrices environnementales restent non contraignantes, et certains pays risquent de devenir des « havres de pollution ».
  • Résistances locales : En Asie centrale, des populations rejettent les projets chinois, perçus comme néocoloniaux. Au Kazakhstan, des manifestations ont dénoncé l’influence chinoise. (voir ici et ici).
  • Manque de cohérence : La BRI est critiquée pour son manque de coordination, avec des investissements dispersés et des projets inachevés. En Chine, des voix au sein du Parti communiste appellent à une meilleure gestion.
  • Concurrence internationale : Les États-Unis, l’Inde et le Japon proposent des alternatives, comme la « Route de la Liberté » indienne, pour contrer l’influence chinoise.

Perspectives d’avenir

Après une décennie, la BRI reste un levier central de la stratégie chinoise, mais son élan s’essouffle. La pandémie de Covid-19 et la crise économique mondiale ont réduit les investissements, tandis que des déboires, comme le retrait probable de l’Italie, fragilisent son image. Xi Jinping insiste désormais sur des concepts comme l’« Initiative de civilisation mondiale », suggérant une diversification des priorités chinoises.

Néanmoins, la BRI continue de transformer les dynamiques régionales, notamment en Asie centrale et dans l’Arctique, où la Chine cherche à consolider son accès aux ressources. Pour les pays participants, le défi réside dans la maximisation des bénéfices économiques tout en préservant leur souveraineté face à une Chine de plus en plus influente.

La Route de la Soie, jadis symbole d’échanges culturels et commerciaux, est aujourd’hui un instrument de la puissance chinoise. La BRI, avec ses promesses de connectivité et de prospérité, redessine les équilibres mondiaux, mais suscite aussi méfiance et résistances. Entre opportunités et risques, elle incarne les ambitions d’une Chine qui aspire à redevenir le « centre du monde », tout en naviguant dans un contexte géopolitique complexe.

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