Dans un climat de tension croissante, des milliers de Philippins ont manifesté le 21 septembre contre un scandale massif de corruption lié aux projets de contrôle des inondations, menant à des affrontements violents près du palais présidentiel de Malacañang à Manille. Des centaines de personnes ont été arrêtées et des dizaines blessées, illustrant une frustration populaire explosive face à la mauvaise gestion des fonds publics.
Cet événement s’inscrit dans une vague plus large de contestations mondiales, où les peuples refusent de plus en plus la corruption endémique et la domination d’élites perçues comme déconnectées et illégitimes.
Les événements du 21 septembre : du pacifique au chaos
Les manifestations ont débuté pacifiquement, avec plus de 33.000 participants rassemblés dans des lieux emblématiques comme le parc historique de Manille et le monument de la démocratie EDSA, exigeant la transparence et la justice. Organisées pour dénoncer les anomalies dans les projets de contrôle des inondations, ces protestations visaient à attirer l’attention sur des pertes estimées à 118,5 milliards de pesos (environ 1,75 milliards €) dues à la corruption entre 2023 et 2025. Cependant, près du palais présidentiel, un groupe d’environ 100 manifestants masqués, armés de clubs et portant des drapeaux philippins ainsi que des pancartes anti-corruption, a escaladé la violence en lançant des pierres, des bouteilles et des bombes incendiaires sur les forces de l’ordre.
La police, déployée en masse pour sécuriser la zone, a riposté, menant à des heures de chaos. Au total, plus de 200 personnes ont été arrêtées, avec des chiffres variant de 216 à 244, dont une centaine de mineurs (au moins 48 à 103, le plus jeune ayant 12 ans). Les blessés incluent au moins 39 à 93 policiers, et environ 50 manifestants ou personnes transportées à l’hôpital, bien que les chiffres exacts pour ces derniers varient. Des images montrent des camions en feu, des barricades détruites et des échauffourées intenses, rappelant les émeutes passées dans le pays. Un manifestant a même été poignardé mortellement, selon des rapports, bien que les autorités enquêtent encore sur les circonstances.
Le contexte d’un scandale éclatant
Ce soulèvement fait suite à des révélations sur des irrégularités dans 9 855 projets de contrôle des inondations, totalisant plus de 545 milliards de pesos (environ 8 milliards €), lancés depuis l’arrivée au pouvoir du président Ferdinand Marcos Jr. en 2022. Marcos Jr. a qualifié l’ampleur de la corruption de « horrible » et a accepté la démission de son secrétaire aux travaux publics, tout en formant une commission indépendante pour enquêter.
Ces projets, destinés à protéger le pays des inondations récurrentes dues aux typhons, ont été entachés de pots-de-vin présumés impliquant des législateurs et des entrepreneurs, exacerbant les souffrances des populations vulnérables après les inondations meurtrières de juillet qui ont tué au moins 40 personnes.
Les organisateurs des protestations, y compris des groupes progressistes, ont promis que ces actions n’étaient qu’un prélude à des mobilisations plus massives, coïncidant avec l’anniversaire de la déclaration de la loi martiale en 1972 sous le régime de Ferdinand Marcos Sr. Des manifestations similaires ont eu lieu dans d’autres villes comme Pasig, Quezon City et Baguio, avec des arrestations et des violences rapportées localement.
Réactions officielles et suites judiciaires
Le palais présidentiel a promis « justice » pour les responsables, tout en condamnant la violence. Les autorités enquêtent pour déterminer si les manifestants faisaient partie d’un mouvement organisé ou cherchaient à semer le trouble, avec des interrogatoires en cours. Amnesty International a appelé à une enquête sur l’usage excessif de la force par la police.
Une poussée globale contre la corruption et les élites
Cet épisode philippin reflète une tendance mondiale où les peuples, las de la corruption systémique, se soulèvent contre des élites qui ne représentent plus leurs intérêts.
Aux Philippines, comme ailleurs, la domination d’une classe dirigeante perçue comme corrompue et déconnectée – souvent héritée de dynasties familiales – alimente un ras-le-bol croissant. Cette « poussée des peuples » évoque les Gilets Jaunes en France, les manifestations anti-corruption au Brésil ou en Inde, et les mouvements pour la justice sociale en Afrique du Sud, où les citoyens refusent d’accepter plus longtemps que des fonds publics soient détournés au profit d’une minorité.
Au Népal, des tensions extrêmes ont éclaté début septembre 2025, avec des manifestations massives menées par la génération Z contre la corruption endémique (indice de 35/100 selon Transparency International) et le népotisme des élites. Face à une pauvreté touchant 20 % de la population et un chômage des jeunes dépassant 19 %, les protestations, initialement pacifiques, ont dégénéré en violences : incendie du Parlement et de résidences de ministres, 19 morts et plus de 100 blessés. Le déclencheur ? Une censure numérique interdisant 26 plateformes de réseaux sociaux, perçue comme une répression des libertés. Sous la pression, le Premier ministre K.P. Sharma Oli a démissionné, et l’armée a pris le contrôle, illustrant un rejet violent d’une élite ostentatoire et déconnectée. Ces événements, comparés à la France prérévolutionnaire de 1789, avertissent que l’ajout de misère à la perte de libertés pourrait mener à une explosion similaire en Occident.
Dans un monde post-pandémie marqué par les inégalités, ces protestations signalent un rejet ferme de systèmes où les élites, autrefois légitimes, sont vues comme des parasites plutôt que des leaders.
Aux Philippines comme au Népal, ces scandales pourraient marquer un tournant, forçant des réformes ou risquant une escalade si les demandes de transparence ne sont pas satisfaites.



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